Il n’a fallu que quelques décennies pour décimer de nombreux paysans organisés en structure familiale et utilisant des circuits de vente de proximité. Les survivants gèrent non plus des fermes mais des exploitations agricoles avec, deux poids deux mesures, des surfaces, des cheptels et des outils en conséquences. Dès lors les petits recoins moins rentables ou non mécanisables ont été rendus à la friche puis à la forêt, altérant directement le paysage et le riche biotope des milieux ouverts. Aussi, les produits agricoles perdirent quelques fois leur variété de goût et leurs qualités ; Et on pourra rappeler les méfaits des productions concentrées qui mènent à des problèmes de sécurité alimentaire (vache folle, poulets à la Dioxine, pollutions diverses, etc.). L’agriculture est sous perfusion avec la moitié des revenus agricoles amenés par des subventions diverses.
Ce beau métier porte de biens lourdes contraintes parmi lesquelles des données particulières qui viennent s’appliquer dans nos montagnes : le semi-désert rural offre au mode de vie citadin une bouffée d ’oxygène apaisante voire salvatrice pour certains. Dès lors, la valeur de l’habitat explosant, les actifs locaux (pour ne pas dire aborigènes) éprouvent des difficultés à se loger. Le foncier aussi devient convoité pour des constructions. Les zones agricoles reculent donc des villages et agglomérations. Ces espaces se voient quelques fois perturbés par certaines populations peu respectueuses des cultures et aménagements pastoraux, ou simplement des personnes peu ou pas informés des pratiques agricoles. Ces mêmes zones sont rarement de taille à lutter. Encore plus si c’est contre des projets d’infrastructure routière, de transport d’énergie, ou des projets industriels comme une carrière d’extraction de granulats.
Là où le développement touristique ou industriel peut amener emplois et services, il peut aussi, on l’a vu, provoquer un déséquilibre dans sa coexistence avec l’agriculture. L’aménagement du territoire a besoin de régulation, on le sait, mais la seule qui s’opère aujourd’hui est celle qu’impose le poids économique à court terme de chacune des parties. C’est là où le bat blesse. Quand il s’agit de pérenniser les gestes paysans, des variétés animales ou végétales anciennes, il ne s’agit pas uniquement d’économie. Quand il s’agit d’entretenir nos paysages générations après générations, de produire les aliments donnant de la saveur aux Cultures du monde, il ne s’agit pas non plus uniquement d’économie. Mais le grand public n’est pas dupe pour peu qu’il observe et s’informe. Il est aussi demandeur d’authenticité, de bon produits goûteux .
Gageons que les paysans montagnards sauront ne pas finir dans un musée.
Vincent Gleyses